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Opération KRA

L'Opération KRA est la capture à Palé, le 3 avril 2000 par les forces spéciales françaises (13è RDP et Commando Hubert) de Momcilo Krajisnik, dirigeant politique serbe de Bosnie. Il était recherché par le tribunal pénal international pour crimes de guerre.

Dans ce documentaire, ces soldats racontent pour la première fois comment ils ont préparé puis réalisé l’une de leurs opérations, celle consistant à capturer l’ancien président du parlement des Serbes de Bosnie.

Soldats d’élite

Février 2000 : en secret, le Tribunal pénal international de l’Ex-Yougoslavie inculpe Momcilo Krajinsnic, ancien président du parlement des Serbes de Bosnie. Or, sur le terrain, depuis des mois, se sont glissés parmi les casques bleus français des membres du 13e Régiment de dragons parachutistes, soldats d’élite spécialistes de la collecte de renseignement. "Krajinsnic, on le voyait tous les jours, on savait où habitaient ses parents" raconte Gérard (comme ses camarades, il ne révèle qu’un prénom, ou un pseudo).

Un jour de mars 2000, il repère un cortège d’Audi noires dans un hameau proche de Pale, fief des Serbes de Bosnie près de Sarajevo. Gérard suppose que "Kra" est revenu chez ses parents, mais doit être sûr. "Une nuit, nous nous infiltrons par la forêt jusque dans un champ, à 80 mètres de la fenêtre d’une salle de bains. J’ai une petite caméra sur trépied, un objectif de 500 mm. Il fait froid, nous attendons. La lumière s’allume. J’appuie sur Rec. La cible va passer treize fois devant la fenêtre. On ne voit que le sommet du visage, mais je reconnais ses sourcils épais. C’est lui", raconte Gérard. 

"Un tour de magie"

En France, l’état-major confie la mission au fameux commando Hubert, les nageurs de combat de la Marine basés à Toulon. Son "pacha" est Laurent Isnard. "Il est localisé, maintenant il faut monter une opération, le prendre sans déclencher une nouvelle guerre et le ramener vivant", explique-t-il. "Ce qu’on devait faire, c’est un tour de magie", s’amuse "Némo" sous sa cagoule. "Le téléporter en prison, sans qu’il s’en rende compte".

En attendant, pour être sûr que la cible – baptisée "John" – reste terrée chez ses parents, Gérard a trouvé un bon poste d’observation : une grange. "Je pouvais lever une tuile de deux centimètres la nuit pour avoir vue sur sa chambre", dit-il. "Mais l’agriculteur venait nourrir le bétail deux fois par jour. Il montait dans la grange et prenait du foin avec sa fourche. Alors on avait creusé une cache le foin, et quand il venait on se glissait dedans. Fallait pas bouger, pas tousser, pas respirer fort".

L’avion du commando Hubert se pose à Sarajevo. Pour ne pas donner l’alerte, ils s’entassent dans des 4x4 de l’ONU, sautent deux par deux dans les fossés, se regroupent à un point de rendez-vous et marchent, à travers la forêt, vers la maison de John. La hantise des soldats français, c’est la réaction des habitants, une fois que l’explosion de la porte aura trahi le début de l’opération. "À Pale la défiance est partout" assure Némo. "Les armes sont ventilées dans toutes les maisons, les caches d’armes doivent pulluler (…) C’est un village d’irréductibles serbes".

"En pyjama, un Colt 45 à la main"

L’équipe est divisée en trois : certains sont chargés de sécuriser le périmètre, de contrôler tous les accès de la maison, d’autres surveillent les abords immédiats et d’autres, accompagnés du "pacha" Isnard, se glissent jusqu’à la porte. Leurs pistolets-mitrailleurs sont dotés de lasers de visée, mais leur faisceau est invisible. "Alors on a acheté des pointeurs de conférence, qu’on a fixés sur nos armes" sourit Némo. Un ou deux points rouges sur la poitrine ont un remarquable effet dissuasif.

Les explosifs sont placés sur la porte d’entrée. "Je suis juste derrière eux, je donne le signal" raconte l’amiral Isnard. BOUM ! En quelques secondes, les vieux parents terrorisés sont assis de force sur un lit. Au premier étage, John s’est levé. Il est en pyjama, un Colt 45 à la main, qu’il lâche pour lever les bras. Menottes. Cagoule.

Tout Pale est réveillé, mais personne ne bouge. Un hélicoptère se pose, emporte le prisonnier vers l’aéroport de Sarajevo où il est remis à des membres du TPY. Condamné en 2006 à 27 ans de prison, il verra sa peine réduite à 20 ans en 2009, sera libéré en 2013 et reviendra, en héros, dans sa maison de Pale.

En savoir + sur la condamnation : http://www.icty.org/fr/press/mom%C4%8Dilo-kraji%C5%A1nik-condamn%C3%A9-%C3%A0-20-ans-de-prison-par-la-chambre-d%E2%80%99appel 

Source : sudouest.fr