Pensez à un pays. C’est bon ? Eh bien, il est fort probable que Dom ait déjà photographié les plus grandes unités qui y ont opéré. France, Australie, Espagne, Brésil, Royaume-Uni, États-Unis, Singapour... La liste des pays qu’il a visités est bien trop longue pour l’étaler ici. C'est toujours un plaisir de suivre ses aventures sur Facebook (@flashbangmag) et de voir ce que le prochain magazine Flashbang nous réserve.
Tu as suivi le RAID en France, le GEO en Espagne, le SCO19 au Royaume-Uni, le BOPE au Brésil... Quelle est ta meilleure anecdote après tant d'années auprès d’opérateurs de si haut niveau ?
Si on parle d’anecdotes mémorables, le Brésil vient immédiatement à l’esprit : je me présente à l’unité dans le “downtown” Rio pour rencontrer le « CORE », une unité équivalente au BOPE. Les premières patrouilles partent déjà et l’on m’invite à les accompagner. J’ouvre la porte arrière gauche du pick-up pour m’installer mais on me dit que je dois monter de l’autre coté : “Si on se fait tirer dessus par la gauche, le chauffeur ne pourra pas riposter, il faut quelqu’un avec une arme derrière lui.”
Ok… L’explication me parait rationnelle mais ne me rassure pas pour autant !
Pour rajouter à l’ambiance, à peine dans le véhicule, tous les hommes dégainent leur arme de poing et la placent entre leurs jambes pour pouvoir réagir plus rapidement.
"La question revient souvent : Quand verrons-nous le DEVGRU ou la DELTA Force dans le magazine ? "
Le ton du séjour est donné….
À l’entrée des favelas, des traces d’impacts sont visibles sur les murs, on m’en montrera également plus tard sur la carlingue de l’hélicoptère de la Police, je n’ai jamais vu ça nulle part ailleurs. Les quartiers dans lesquelles nous nous rendons pour patrouiller et faire des images sont déjà “pacifiés”, pourtant, impossible d’y pénétrer sans qu’un premier véhicule ne s’assure d’abord que les conditions de sécurité soient raisonnables pour y emmener un photographe ! On imagine ceux qui ne sont pas contrôlés par les forces de l’ordre…
Nous laissons les véhicules pour parcourir les ruelles à pied et même si je ne ressens pas le danger, la tension est palpable et ils ne peuvent jamais relâcher leur garde, même quand je leur propose d’acheter de l’eau. Ils doivent se relayer pour boire chacun leur tour tout en assurant notre sécurité.
Imaginons que tout est possible, si tu avais le choix entre photographier le DEVGRU, le CAG ou une autre unité de ton choix, qui verrions-nous dans Flashbang Magazine ?
La question revient souvent : Quand verrons-nous le DEVGRU ou la DELTA Force dans le magazine ? Malheureusement mais fort logiquement cela n’arrivera jamais…J’ai pourtant eu la chance de rencontrer brièvement plusieurs anciens membres de ces unités à titre personnel mais malheureusement, l’expérience s’arrêtera là !
Souvent, les lecteurs ne réalisent pas la difficulté qu’il y a à pouvoir côtoyer des unités mêmes moins « célèbres ». Il m’a fallu par exemple près de trois ans pour pouvoir finalement travailler avec le SCO19 et j’étais le premier à le faire. D’ailleurs, parmi toutes les unités qui ont été publiées dans Flashbang, plusieurs n’avaient jamais accepté un photographe auparavant. J’ai toujours dans le viseur quelques unités emblématiques avec lesquelles je suis en contact et ne désespère pas de pouvoir travailler avec elles un jour.
Par expérience, je sais que la règle…C’est qu’il n’y a pas de règle ! Des demandes auprès d’unités qui paraissent facile d’accès n’aboutissent finalement jamais alors que d’autres qui semblent en théorie très compliquées se concrétisent finalement très vite.
Mais pour en revenir à la question, oui bien sûr, il y a toujours ce trio mythique SAS / DEVGRU / CAG ! Mais j’y ajouterai également les SBS et le FBI HRT.
En fait, je ne ressens aucune frustration autour de cela car j’ai déjà eu le privilège de travailler avec beaucoup d’unités qui me faisaient « rêver » et que j’ai découvertes dans des magazines comme RAIDS quand j’étais adolescent. Je pense entre autre au Commando Hubert qui a été la réalisation d’un rêve de gosse pour moi.
"Depuis le sommet de la tour Montparnasse à plus de 200 mètres de haut, je me sentais bien seul dans mon petit harnais et la corde me paraissait bien fine…"
Nous savons que tu as dû te suspendre à la façade d'un bâtiment avec un harnais pour photographier un opérateur en rappel, mais quelle a été la chose la plus difficile ou la plus dangereuse que tu aies eu à faire pour prendre une photo ?
À partir du moment où l’on évolue dans un milieu avec des armes chargées, des explosifs et que l’on manœuvre avec des hélicoptères ou des bateaux, le danger est forcement présent. Mais cette part de risque inhérente est en grande partie contrebalancée par le professionnalisme et les compétences des opérateurs, pilotes, etc.
J’ai une confiance absolue en mes interlocuteurs. Ce sont les meilleurs dans ce qu’ils font et quelque soit la situation, si ils me disent que c’est ok, je fonce sans hésitation.
Cette confiance mutuelle est une notion essentielle au sein de ces groupes et je crois qu’ils apprécient que je joue le jeu.
En revanche, il y a parfois des situations disons, « très inconfortables ». Avec la BRI de Paris, j’ai été par exemple suspendu en rappel depuis le sommet de la tour Montparnasse à plus de 200 mètres de haut. Je me sentais bien seul dans mon petit harnais et la corde me paraissait bien fine…
Mais les photos valaient la peine et surtout hors de question de me dégonfler devant eux !
Encore une fois, quand toutes les mesures de sécurités ont été prises, c’est uniquement dans la tête que cela se passe et c’est enrichissant d’apprendre à dépasser cela.
Mais il n’empêche qu’au moment d’enjamber le parapet avec 200 mètres de gaz en dessous…
Avec un matériel photographique aussi coûteux, tu dois être en sécurité pour mener à bien une séance photo dans un endroit aussi "spécial" que les favelas. Comment fais-tu pour ne pas avoir de problèmes lorsque tu travailles sur des sites "non contrôlés" ?
Et bien contrairement aux idées reçues, je travaille avec un matériel assez limité et surtout très rustique. Un Nikon D3 qui a plus de 10 ans, 3 objectifs et un flash. Les unités s’attendent parfois à voir débarquer une équipe avec des éclairages, etc. Mais tout cela doit rester très simple car je dois pouvoir suivre les opérateurs au plus près dans les avions, les hélicoptères, les véhicules, les bateaux, la jungle, la montagne…
Avec l’expérience on apprend vite à conserver uniquement ce qui est essentiel et fonctionnel. Cela me frappe d’ailleurs toujours dans les unités. Plus les gens sont opérationnels et aguerris, plus l’équipement est simplifié et rationalisé. Pas de place pour les gadgets inutiles !
Mais pour en revenir à ta question, j’ai déjà eu quelques sueurs froides, toujours à Rio.
Le BOPE me donnait RDV à 4h du matin à leur base située en bordure des favelas pour partir en mission à l’aube et pour cela je devais quitter mon hôtel en pleine nuit avec mon matos…
Pendant toute la durée du trajet en taxi, je ne pouvais pas m’empêcher de penser que le gars allait soit m’emmener dans une ruelle pour me dépouiller soit me livrer directement aux narcos parce qu’il pensait que j’étais flic !
Malgré le fait d’être aux côtés des meilleurs gardes du corps de chaque pays que tu visites, nous savons que lors d’une séance, tu as reçu un tir d’un GIGN. Comment a été l'expérience de voir l'action en face plutôt qu’à travers l'objectif de ton appareil ?
Pas du tout ! Je ne sais pas d’où vient cette anecdote ? La vérité est très différente : il y a plus de 10 ans, j’ai la chance qu’un ami du GIGN effectue sur moi ce qu’ils appellent le « tir de confiance ». C’est normalement uniquement réservé aux membres de l’unité et cela se fait avant de recevoir le brevet. On revêt un gilet pare-balles au milieu duquel est accroché un pigeon d’argile (cible de balltrap) et on vous tire dessus à 10 mètres avec le fameux revolver mythique dans l’unité, le MR73.
Cela symbolise la parfaite maitrise du tir et des émotions ainsi que la confiance mutuelle qu’ont les équipiers du Groupe. C’était vraiment un privilège incroyable.
Voir des unités de si haut niveau te donner leur patch est une chose totalement inédite, c’est un patch qu’ils ont eu du mal à obtenir et qu’ils sont si fiers de pouvoir porter. Et pourtant, tu es parvenu à en récupérer quelques-uns, comment as-tu fait ?
Sur la quarantaine d’unités avec lesquelles j’ai déjà travaillé, une seule ne m’a pas laissé de patch car c’était vraiment contraire à sa culture.
Du coup, j’ai la chance d’avoir une « collection » assez unique de par la variété des unités et des pays représentés mais également parce que tous ces patches m’ont été offerts directement par les opérateurs. Cela leur donne une valeur sentimentale inestimable à mes yeux.
C’est effectivement un geste fort que de remettre le patch de son unité à quelqu’un de l’extérieur et je ne prends jamais cela à la légère. C’est toujours une grande fierté pour moi de les recevoir.
Tu es descendu en rappel, volé en hélicoptère, embarqué dans un bateau pneumatique, tu es entré dans la jungle, tu as vécu l’expérience d’un tir de confiance… Mais il te reste quelque chose à faire. A quand une séance photo avec des airsofteurs ? (On se propose en volontaires comme modèles !).
Et bien cela sera avec plaisir ! …Quand vous pourrez m’emmener en hélicoptère au dessus de l’opéra de Sydney avec un sniper ou peut être dans un sous-marin avec des nageurs de combat ? ;-)